Devenus
trop lisses Les vieux souvenirs infidèles Nous
glissent des doigts et s'enfuient Comme l'eau vive Pressée
de tarir La mémoire du ruisseau
Vitale
dimension Qu'offre un meilleur souvenir Et tu tentes en
vain De t'abreuver En saisissant la faille Dans le creux
de tes mains
L'urgence Leurre la profondeur De la
résurgence Du vitrail de tes ambitions Rêves
frustrés de lumière En surface de
l'instantané
*
Sur le sofa discret De la
créativité L'opium des sens Couplé à
la douceur de l'alcool Rend moelleuse l'ébriété
Alors
la page blanche Vole et s'enflamme Lentement Pour la
fortune mutuelle D'un narguilé Panorama du pollen de
mots Portés par la symbiose De
l'accomplissement
Dans le marécage de
l'inassouvissement L'inaccomplissement auto-torturant Débouté
de tout état de grâce Avait fini par tordre La
grue en fil de fer De ma patience
*
Une
trompette dans la nuit Te dit homérique Bois-moi! Tu
seras Mon orange pressée du matin! Que ton verre
d'orage Se teinte de foudre!
Dans la rage du
réveil Occultant le culte du sommeil La nuit se
consume Et consume Les brumes de lune
Le charisme de
l'infortune S'égare sur son échelle
diagonale Laissant la plume s'enluminer Dans le cénacle
envoûtant D'une tessiture enfiévrée De
doux chants magnétiques
*
Le gris intime de
minuit Conjugue à l'imparfait Le souvenir
diaphane De n'importe quel visage Si doux soit-il La
nébulosité s'émancipe Dans le
cloaque D'un coït de songes obliques
Derrière
le mur Du tribunal de l'adversité L'incube utilise
sa nuit Pour récuser Le monde scrutateur Et les
propos bifides
Le plaisir anticipé Mouille cette
rivière Qui pénètre la veine De son
propre lit Ascension vers l'illégitime Où
l'edelweiss carnivore Dévore les
scrupules-inventeurs De la semence de l'ignorance
Narcisse
a dû pétrir Sa montagne d'oublis Dans la pâte
à sel Du soliloque de sa faconde Préférant
défiler Sans témoins implicites Bien seul
devant lui même
*
Regard Cette richesse
inépuisable Consomme l'héritage Que chaque
instant en s'écoulant Vient déposer Dans le
regard de l'autre
Richesse incalculable Pour un regard
mendiant Fortune d'images fortuites Nées du frai
permanent Du soleil et de la carte blanche du temps
Images
en fratrie De la lumière des secondes Férues
d'éternité
Images universelles Images des
êtres Image de l'autre Image de soi Image que l'on
donne Images que l'on trouve
Scrupules et
magnificence Aux petits soins d'images péremptoires Magie
et imagination Un visage élitiste Hérite de
lui même
Une étincelle ensorcelle L'échelle
matricielle Descendue du désert de Junon
*
Les
non-dits Se privent des bienfaits De la
réciprocité Souvenirs fulgurants et
précaires Devenus stériles Qui s'immergent et
se noient Sous la surface pourtant limpide De la source non
partagée De l'instant
Les non-dits s'atrophient
Dans le mal-entendu De la pupille des Anges
Les
non-dits Sont des bulles qui circulent Sans discernement Au
gré des ridules De la mélancolie Ou de la
nudité de la banalité
Dans le plus pur
reflux De sa marge évanescente L'histoire
s'évapore Et nous oublie Dans son meuble à
multiples tiroirs Contenant le passé Une
commode Soumise à l'emprise De l'entreprise du
temps Caviar du pouvoir Des opinions convergentes Mémoires
matérielles Vouées à l'immortalité
Je
veux être la dune Sans cesse Profilée par le
vent Élément émergeant des éléments Je
veux être à la fois Grain de sel et grain de
sable
*
S'écoulant sur son lit Légèrement
pentu Le fleuve de la vie Même à temps
partagé N'aura jamais besoin De nos
consentements Pour subsister
Ainsi demeure invisible La
chambre d'échos Des flux d'instants redondants
Les
méandres créent ces miroirs Où
s'enchaînent d'impalpables Et d'inexorables latences De
leurres temporels immergés
Les mémoires
décalées De nos lignées en
communion Garderont inconsciemment Jusqu'à la nuit
des peuples La vision spatiale immuable Du même ciel
fidèle Aux mêmes étoiles (Mais
détroussé d'abeilles)
*
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On
se donne nécessairement Ces occasions de boire Avec
modération Le vin de garde Élevé dans
la résilience A la sauvegarde du passé
On
se donne parfois Ou souvent Des occasions de boire Ce
vin nouveau tiré Immodérément Du
cristal translucide De la perspective De nos pensées
Et
l'on se donne le droit De s'élever vers ces
vapeurs Fertiles et sublimes Relevant du domaine Et de
la part des Anges -Nos vins des lendemains -
*
Émigrés
impécunieux D'une île de nulle part Ils
avaient gravé Sur des grains de riz La supplique
d'un monde meilleur Mais n'ont pas osé Fédérer
leurs craintes Et parler librement de famine
*
Du
haut du labyrinthe De son arborescence Enrichie de
lichens Avant d'être périmé L'Homme
jouit De sa relève
*
Dansez!
Dansez! Dansez! mes raisons-d'être Dansez pour
moi! Dansez encore! Dansez sur la chenille Et le pont
Mirabeau Vos spirales m'inspirent
Chantez!
Chantez! Chantez! mes souris vertes Chantez pour ma
mémoire! Chantez encore! Chantez toujours! Mon
arc-en-ciel oublieux et terni S'éternise en
villégiature
Ne pleurez pas! Belles rebelles Ne
pleurez plus! Séchez vos armes! Car je ne serai
plus Là pour apercevoir Vos chaudes larmes Encombrer
vos mouchoirs
Pas de sang d'encre! Dans le cœur
de l'ordinateur Les meilleurs souvenirs Dansent chantent ou
meurent La mémoire demeure
*
Un jour
donné Ton ego se retrouve en partance Sans
préméditation Et tu deviens
alors Irrémé-diablement (ou
diaboliquement) Un touriste obligé de la mort
Un
jour repris! Et tu deviens Le sans papiers du souvenir Qui
grève -pour un temps - Et contagieusement Le
rétroviseur de la survivance Ressuscitant
provisoirement La conscience de l'humilité
Seul
le chien infidèle à l'histoire Hurlera à
la mort Qui le gratifiera pourtant D'un nouveau
maître
*
Tel l'oiseau qui revient Toujours
fidèle au – printemps Le futur découd La
dentelle couronnée Du passé Un chemin de
vie Exempt de sauf-conduit Ne cesse d'empiler Les
truismes empiriques De nos présents
évanescents
*
Seul au centre du monde Drapé
dans la logique intime De sa réminiscence-génétique Dénudé
par un faisceau De regards convergents Le
Taureau Subalterne Ne peut
que Devenir Compulsivement Misanthrope!
*
L'élégie N'est
jamais Un jour « J » Mais un sans
lendemain un « ci-gît » Car le
pire conspire et parvient à ses fins En un lieu où
l'ombre ne bougera plus Ultime croisée Des chemins
de l'éternité Devenue frontière Pour
passeport testamentaire Le ciel se disloque Et défroque
les yeux
Les flammes vives du cheval au galop Doublées
d'une sarbacane Ont ruiné le pré-carré De
mes frères de rimes
trous noirs
L'intense
fragrance des lis blancs Repousse l'écorce des brumes
d'encens Communion baroque Enveloppant les grumes
vernissées Langues de bois des secrets A jamais
enfermés
Le silence ne cédera point
Ainsi
naît la blessure De ce temps délinquant Ses
coups d'éclat d'avanie Et le chaos sculpté A
même le blanc manteau marbré L'hiver recouvre Le
mur opaque du silence
Dieu que la pierre est froide et
dure!
Et nous ne verrons jamais plus Ceux qui dans le
déchirement Nous auront précédés
Aux
confins d'une République tellurienne Un sublime
arc-en-ciel N'a pu que s'élever dans la grandeur D'un
- vieil airain féru de cuivres - Acteurs
diligentés Vers la terre promise
Pendant un
temps La réalité s'est mise à dériver En
apnée de boussole Dans le large estuaire en crue De
ce fleuve du doute
Un nouveau bleu à l'âme
Et
ce sentiment d'impunité De l'infinitude pyromane Quand
finira-t-il De jeter de l'huile Sur l'obscur foyer De
mes pensées
Camarde-gargouille Maîtresse
résurgente De scories ingambes Qui minimalisent Le
culte de l'existence!
24 janvier et 4 mars 2004 -
*
Pour
le «feu» des Minimes je rime une maxime Des voûtes
d'Art-Majeur qui envoûtent l'intime : «Mieux vaut
un - sincère-nain - qu'un mythoman' géant Aux
vitraux embrumés du chef-d'œuvre roman ».
*
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