Hêtre majesté Tu
m'obliges à m'incliner Aux pieds des ancêtres.
Mille
flamants roses Sur le miroir de Camargue; Mirage! Deux
mille.
Un rond de jonquilles Fête son
anniversaire; Douze bougies jaunes.
Chaque
chêne-liège Doit ôter son pantalon Sans
se déchausser.
Le setter fébrile, Odeur
de graisse à fusil, Parle aux courants
d'air.
Micocoulier nu Pachyderme spectateur Du
cirque d'hiver
La neige a poussé Au soleil, de
bonne grâce Sur mon cerisier.
Un vieil
olivier Sous la brise encore tiède Berce ses
petits.
Le gel nous concocte Des stalactites de
glace Armes de débâcle.
Au bar du
printemps En l'honneur des primevères Viens, je
t'offre un vers
Fou de grues cendrées A
rendez-vous de nulle part Et oublie le temps.
Ô!
Dieu des ronds-points Jardinier des gabegies; Le Nôtre
a le sien.
Gracile jonquille D'un œil de cyclone
tu guettes En hochant la tête.
Sillon du
tracteur Plagiant un chemin de fer Vaches broutent en
train.
Un ruban de brumes Vient d'épouser la
vallée; Noces d'ambroisie.
Mimosas en
fleurs Cheveux blonds de la cousine Que j'aime en
brassées
Va savoir pourquoi Dès lors que
la lune passe Tous les chiens aboient?
Mon chien s'est
blessé, Dérapage sur la page D'un
haïkaï.
Très haute tension, Une portée
de corneilles : Notes du solfège.
Papillon
pressé, Un éphémère haletant N'a
jamais le temps.
Les titans d'hiver Ont poussé
le Canigou Sur l'étang qui fume.
Tenue de
printemps Une vigne coquette a Chaussé ses
socquettes
Depuis hier matin Quelques couples de
tulipes Dansent sous le vent.
D'abord les violets, Deux
mois d'iris devant moi, A la fin les jaunes.
Un lis
clarinette Évoque Sydney Bechet, Sa petite
fleur.
En défloraison Des larmes
éléphantesques Tu verses tulipe.
Pivoine
ô! Pivoine, Bravons l'interdit d'aimer, Inventons
l'hymen.
Mistral des pinèdes Courbe la cime
docile Des pins de Panurge.
Rythmé au soleil Un
flamenco de tulipes Implore le ciel.
Fouler l'herbe aux
pieds Aller dévisser les pommes : Dessein
d'Asmodée.
L'écureuil glaneur Du planteur
s'attire l'ire Pour sa tirelire. *
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La nature danse, Son air fait
valser les branches Et l'herbe onduler.
Figues de
septembre Dessinées par le soleil; Croquis à
croquer.
Si le potager S'associe au poulailler, Festin
régalien.
Quand cesse la pluie Les grappes de
raisins mûrs Pleurent de bonheur.
Au creux du
verger Sur l'épais kilim d'humus Une pêche
choit.
Éden égaré Vecteur de
félicité Et d'égarements.
La haie
de bambous Où perchent les escargots Sans savoir
pourquoi.
Closerie intime Ton sein est
indescriptible Sauf un séquoia.
Course dans le
ciel Un cyprès double un platane; Folle
tramontane.
Cent sillons lustrés Mille miroirs
au soleil : Décor de charrue
La verte
prairie Son regain de foin séché : Un art
éphémère.
Mon amie la taupe Ne
verra jamais la lune; Pauvre « tourne-sol ».
Une
fois par an Sur un flot de chrysanthèmes Voguent nos
pensées.
Cerné de béton Ce domaine
luxuriant Provoque la ville.
On l'a torturé Le
voilà canon dans l'art Topiaire pour plaire.
Collé
contre toi On entend battre ton coeur, Monumental
chêne.
Amant de Bretagne Peintre sort ton
chevalet Et bat ta compagne.
Proche des lilas Un
arbre de Judée mauve Confond ses pétales.
Jardins
familiaux, On y cultive le sol Et la sympathie.
Un
jeune lézard, Qui se ressemble s'assemble, Vieux mur
lézardé.
Criblée de soleil La rose
trémière rose, La vache qui fume.
Au pré
d'Eugènie Chef-d'œuvre de végétaux, Jardin
de génie.
Novembre en forêt Se déshabille
en silence; L'arbouse rougit.
Le temps est venu De
traire les oliviers; Lait d'ambre au moulin.
Mécontents
du vent Les iris restent couchés; Grève sur
la grève.
Un pied de lavande S'est vautré
sur un muret A trois pas du chat.
Autour de
minuit Sachez bien qu'un potiron Pleure Cendrillon.
Au
bout de la nuit Le coq revient prohiber L'opium du
sommeil.
Paix dans la campagne Chien et chat
entrelacés; Le silence gagne.
Sur un lit de
roses Fleurissent les jardiniers Concupiscemment.
Enclos
poulailler Sérail de proximité Non loin du
cyprès. *
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